ZFE-M : le gouvernement recule et le micmac continue

Le Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires a annoncé ce matin un allègement de la mise en place des Zones à Faibles Émissions, les ZFE. Ce qui pose néanmoins quelques questions.

TRANSPORTS – Les ZFE-m, de leur nom complet Zones à Faibles Émissions – Mobilités font encore parler d’elles. Le Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires a annoncé ce matin dans un dossier de presse les nouvelles mesures qui allaient accompagner la mise en place des ZFE. Et autant vous dire que la situation n’est pas prête de s’éclaircir et d’être limpide. Décryptage.

C’est un dossier de presse publié ce matin par le Ministère qui rabat les cartes. Les Zones à Faibles Émissions (ZFE) sont des dispositifs mis en place pour réduire la pollution de l’air et favoriser la transition vers des transports plus propres. Les ZFE visent principalement à améliorer la qualité de l’air en réduisant les émissions de polluants atmosphériques, tels que les oxydes d’azote (NOx) et les particules fines, qui sont souvent associées aux véhicules à moteur. Pour cela, les véhicules les plus polluants peuvent être restreints ou interdits de circulation. Cela peut inclure les voitures diesel anciennes, les poids lourds et les véhicules utilitaires légers non-conformes à certaines normes d’émissions.

Pour réguler la circulation, le gouvernement a mis en place un certificat qualité de l’air appelé Crit’Air. La vignette Crit’Air permet de classer les véhicules en fonction de leurs émissions polluantes en particules fines et oxydes d’azote. Elle est obligatoire pour circuler au sein d’une Zone à Faibles Émissions Mobilité.

 

Pourquoi mettre en place des ZFE ?

Il faut en convenir, les ZFE-m n’ont pas été mises en place et réfléchies pour embêter les populations locales. En 2021, Santé Publique France alertait dans un communiqué de presse sur l’impact de la pollution de l’air ambiante sur la vie des Français. En moyenne, 40 000 Français décèdent chaque année de la pollution de l’air, notamment par une forte exposition aux particules fines. La dégradation de la qualité de l’air dans les métropoles françaises a poussé le gouvernement à réfléchir à un dispositif permettant de contrer cet effet de dégradation. C’est là que sont nées les ZFE. En 2018, l’État ainsi que 15 métropoles ont signé un engagement pour développer des Zones à Faibles Émissions. La première métropole à l’avoir mis en place est la Métropole du Grand Paris.

Une situation d’obligation

En 2019, le vote et l’instauration de la loi d’orientation des mobilités changent la donne. Désormais, les métropoles où la qualité de l’air est trop dégradée seront obligées de mettre en place une Zone à Faible Émissions. En 2022, c’est un décret ministériel qui fixe les exemptions à l’obligation de mettre en place une ZFE pour les agglomérations de plus de 150 000 habitants. “L’obligation est levée dès lors que les concentrations moyennes annuelles mesurées en NO2 sur le territoire de l’agglomération sont inférieures ou égales à 10 μg/m3 (valeur guide établie par l’OMS) au moins 3 années sur les 5 dernières années civiles, ou qu’au moins 95 % de la population de chaque commune de l’agglomération n’est pas exposée à des concentrations supérieures à 10 μg/m3” annonce sur son site le Ministère de la Transition Écologique.

Carte du déploiement des zones à faibles émissions (ZFE)
La carte de déploiement des zones à faibles émissions il y a encore quelques jours / Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires

À Lille par exemple, la Métropole Européenne de Lille avait par ailleurs consulté les métropolitains pour les faire participer à la mise en place de cette nouvelle ZFE, mais les résultats n’étaient pas concluants. Stéphane Baly, élu écologiste, avait d’ailleurs critiqué le projet de ZFE de la MEL. “Les deux trois éléments différentiables avec le projet posé : un, c’est qu’on voudrait un troisième scénario. Quand je parle de “contrat social”, c’est qu’une ZFE qui inclut Warneton ou Fromelles n’a juste pas de sens. […] Je ne partage pas le périmètre proposé, qui concerne toute la MEL. Globalement, on ne résonne pas en termes de territoire métropolitain, mais en termes de mobilité au quotidien.” expliquait alors l’élu lors de ma rencontre autour des enjeux de la mobilité dans la Métropole.

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Une amélioration significative de la qualité de l’air

“La qualité de l’air en ville s’est améliorée ces 20 dernières années”

Christophe Béchu, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires

La qualité de l’air en ville s’est améliorée ces 20 dernières années, sous l’effet des actions menées, comme en témoigne la diminution forte des émissions de polluants (baisse de 62 % des émissions nationales de NOx depuis 2000) mais les efforts doivent être poursuivis.” explique Christophe Béchu. Pour expliquer cela, Christophe Béchu s’appuie sur les chiffres de la qualité de l’air en 2023 dans les principales agglomérations françaises. On remarque en effet que la qualité de l’air s’améliore progressivement depuis plusieurs décennies.

Graphique présent dans le dossier de presse. / Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires

En conséquence, le Ministre annonce que Strasbourg, Marseille et Rouen ne sont plus en dépassement régulier des normes de qualité de l’air. En d’autres termes, cela veut dire que ces trois métropoles sortent du calendrier obligatoire d’évolution. Les métropoles sont donc désormais libres de faire comme elles l’entendent. Une seule condition persiste : garder les mesures déjà en vigueur. La Métropole de Strasbourg a d’ores et déjà annoncée qu’elle continuerait de développer sa ZFE comme cela était prévu.

Quid de la Métropole lilloise ? Mise en place mais….

Stéphane Baly en avait parlé dans son entretien, la Métropole Européenne de Lille a été placée en “territoire de vigilance” : cela veut dire que la Métropole Lilloise ne dépasse pas les seuils réglementaires de qualité de l’air. Désormais, les territoires de vigilance sont dans l’obligation d’instaurer une ZFE pour les véhicules non classés (qui ne peuvent pas se voir attribuer une vignette Crit’Air), c’est-à-dire les véhicules immatriculés avant le 31 décembre 1996, véhicules utilitaires légers immatriculés avant le 30 septembre 1997 (non classés) et/ou des poids lourds immatriculés avant le 30 septembre 2001. Pour les Métropoles où des mesures sont déjà en place, il n’y a plus d’obligation de renforcement des restrictions.

La consultation de la MEL contenait deux propositions de scénario : le premier scénario concernait l’interdiction de circulation des véhicules non classés et un second scénario visant à interdire en plus des véhicules non-classés, les Crit’Air 4 et 5, les deux scénarios rentrant en vigueur au 1er janvier 2025. Stéphane Baly ne cachait pas sa préférence en l’état pour le scénario 2, visant à “se mettre sur le chemin de la reconquête de la qualité de l’air“.

Mais une question se pose : maintenant que la Métropole n’est plus obligée de mettre en place des mesures restrictives hors véhicules non classés, est-ce que la communauté urbaine va aller jusqu’au bout ? Comme l’annonçait la Voix du Nord, le bilan de cette consultation citoyenne sera présenté au prochain conseil métropolitain du 19 avril. Désormais, les yeux sont rivés vers le siège de la Métropole.

Pour aller plus loin
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